Viol et violences sexuelles
Les pulsions sexuelles masculines sont incontrôlables ; les hommes auraient des besoins sexuels irrépressibles.
L’argument de la pulsion incontrôlable est souvent avancé pour justifier certains viols. Ce stéréotype est doublement toxique. Il permet d’une part aux hommes de justifier leurs comportements sexuels insistants voire agressifs, sous couvert de besoins physiologiques, vitaux, auquel il faut absolument répondre. Il fait porter la responsabilité aux femmes d’éviter d’être attirantes pour ne pas attiser les désirs irrépressibles des hommes. D’autre part, il laisse entendre aux femmes qu’il est plus prudent de se soumettre que de risquer que l’homme perde le contrôle. Si les pulsions sexuelles masculines étaient réellement incontrôlables, nous serions témoins ou victimes de viol constamment, en toutes circonstances. Pourtant, les hommes, à part dans des cas isolés, ne font pas l’amour en public et savent parfaitement se contenir au travail, dans la rue, ou encore en attendant le bus. Le viol n’est pas le résultat d’une pulsion, mais il est dans la plupart des cas calculé et le fruit d’une stratégie.
Les femmes ne savent pas ce qu’elles veulent dans le domaine sexuel : « Elle dit non, mais ça veut dire oui ».
Beaucoup d'hommes pensent que quand on ne sait pas ce que l’on veut, c’est que ça veut dire qu’on est d’accord. Dans de nombreux films notamment, nous voyons des femmes dire « non » à un homme qui persiste et finit par obtenir ce qu’il veut. L’idée que les femmes disent non pour se faire désirer, ou encore pour ne pas passer pour des filles « faciles » est également très répandue. Tout ceci a pour résultat de pousser un certain nombre d’hommes à insister — voire à forcer — malgré un refus, et d’effacer la nécessité du respect du consentement. Ainsi, selon le sondage, nombreux sont ceux qui pensent qu’il est normal d’insister pour avoir des relations sexuelles. Le consentement est nécessaire à tout moment. Chacun·e à le droit de refuser un rapport ou une pratique sexuelle, quel que soit le moment, même si les préliminaires ont déjà commencé, et quel que soit le type de relation entretenue avec l’autre. Un « non » doit être compris comme tel, ce n’est pas un appel à la négociation.
Il existe un « devoir conjugal » qui oblige les membres d’un couple à avoir des relations sexuelles.
L’idée sous-jacente est que la femme appartient à l’homme et qu’elle doit être disponible pour répondre à ses « besoins » sexuels. Ce mythe du « devoir conjugal » a pour conséquence de nier l’existence du viol conjugal, ce qui est en contradiction avec le droit belge, qui interdit le viol entre époux depuis 1989.
Le viol a lieu dans une ruelle sombre et est commis par un inconnu.
Un sondage réalisé par Amnesty International en 2014 qui montrait que 60 % des répondant·e·s estimaient le viol est d’abord commis par des inconnu·e·s et des personnes rencontrées sur internet. Certains viols sont effectivement commis par des personnes inconnues et il est important de le prendre en compte, afin de ne pas le banaliser et pour apporter la meilleure réponse possible à toutes les victimes, quelles que soient les circonstances. Il est tout aussi important de mettre en lumière le fait que "'la majorité des viols sont commis par un·e proche"'. Le viol conjugal, l’inceste ou encore le viol commis par un responsable hiérarchique au sein du travail sont en effet répandus dans des proportions alarmantes et le « mythe de l’inconnu » invisibilise cette réalité.
La violence est excitante pour les femmes
"Le succès planétaire d’œuvres telles que les roman et film « Cinquante nuances de Grey », mettant en scène une relation sadomasochiste, n’y est peut-être pas pour rien. L’idée qu’« on peut jouir lors d’un viol », comme l’a exprimé l’animatrice radio française Brigitte Lahaie en 2018, participe de ce stéréotype." Il est en effet possible que le corps réagisse indépendamment de la volonté de la victime et qu’un orgasme soit ressenti, mais il ne s’agit pas de « plaisir » sexuel. Dès lors que 0 % des femmes trouvent du plaisir à subir des violences sexuelles non consenties, le prétendu plaisir qu'elles auraient ne peut justifier ces violences.
« Mais il faut voir comment elle était habillée… »
"Nombreux sont ceux qui estiment que le port d’une tenue sexy ou provocante fait porter la responsabilité du viol à la victime. Ils estiment d’ailleurs que les les femmes « sexy » et « provocantes » sont parmi les plus exposées au viol." L’idée qu’une femme peut, par sa tenue, inciter un homme à la violer est l’expression de stéréotypes profondément ancrés sur la sexualité masculine et féminine. Dans les faits, des femmes sont violées ou agressées, peu importe ce qu’elles portent. Aucun type de vêtement n’est une invitation à caractère sexuel ni un consentement implicite. Ce qu’une femme portait lorsqu’elle a été violée n’a aucun lien avec son agression. Un viol n’est jamais imputable à la victime.
La victime est souvent responsable de son agression.
"Il n’y a pas que la manière dont les femmes s’habillent qui est incriminée lorsqu’il s’agit de montrer que la victime porte une part de responsabilité pour son viol. Beaucoup de personnes estiment qu’il existe des circonstances atténuantes qui peuvent “justifier” un viol, ou au moins le rendre moins condamnable. Il peut s’agir par exemple du fait que la victime a eu un “comportement provocant”; qu’elle n’ait pas explicitement dit « non » , ou encore qu’elle se soit rendue volontairement chez le violeur." Les femmes font constamment face à des injonctions quant à leurs façons de se comporter. N’ayons pas peur de le répéter : rien ne peut justifier un viol. Ni le lieu fréquenté, peu importe qu’il soit réputé « dangereux ». Ni la consommation d’alcool et de drogue par l’agresseur ou par la victime. Ni le fait d’avoir entamé un flirt avec quelqu’un. Rien!
Les femmes accusent souvent à tort pour se venger, ou parce qu’elles n’assument pas une relation.
"Ce mythe particulièrement persistant est fondé sur des stéréotypes sexistes (« les femmes aiment se venger ») et mène à ce que les victimes de violences sexuelles soient presque systématiquement traitées avec méfiance." En réalité, les victimes doivent faire preuve de beaucoup de courage et de force pour dénoncer une agression à la police. Une procédure pénale est souvent un énorme poids pour la victime : il n’est pas rare que l’accusé, voire l’autorité de poursuite pénale, mette en cause de façon blessante sa personne, sa réputation et sa crédibilité. L’argument du danger de fausses accusations est toujours avancé lorsqu’il s’agit de réviser le droit pénal en matière sexuelle, le plus souvent sans faire référence à aucune base empirique qui permettrait d’étayer ces affirmations. Les victimes méritent d’être crues, elles doivent bénéficier du soutien auquel elles ont droit et les faits qu’elles dénoncent doivent faire l’objet d’une enquête approfondie.
Les femmes noires sont plus chaudes que les autres et consentent à des relations sexuelles plus facilement.
Les stéréotypes racistes ont été utilisés durant la période esclavagiste et pendant la colonisation pour minimiser et excuser les violences sexuelles perpétrées par les hommes blancs sur les femmes noires. Les violences de genre et plus particulièrement les violences sexuelles sont le résultat des inégalités de pouvoir, c’est pourquoi elles touchent plus intensément les femmes noires qui sont à l’intersection du sexisme et du racisme. La culture du viol touche toutes les femmes, mais les stéréotypes racistes la renforcent. Les femmes noires sont souvent décrites comme sauvages, animales, envoûtantes. La misogynie et le racisme véhiculés par de tels mythes nourrissent une image fantasmée de ces femmes et cela les expose plus à la violence. Ces stéréotypes encouragent des comportements toxiques masculins et ils participent à la banalisation des violences en mettant une partie de la responsabilité sur les victimes.
Les viols sont souvent commis par des personnes migrantes ou d’origine étrangère
Très régulièrement, des faits divers inventés de toutes pièces mettant en scène des migrants ou des étrangers dans des affaires de viol émergent dans les médias. Cela permet de donner un visage aux violeurs en s’y détachant, en les montrant comme étrangers et extérieurs à notre “culture”, alors qu’en réalité des viols sont commis quotidiennement par des hommes “lambda”, des hommes blancs. De nombreuses recherches montrent que de telles fake news sont inventées par des groupes d’extrême droite et diffusées par des médias peu scrupuleux de vérifier leurs sources. Cela renforce le racisme et masque la réalité de la violence de genre en Belgique résultant des inégalités entre les hommes et les femmes. "Note concernant l'aspect légal : Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 22 mai 2014 tendant à lutter contre le sexisme dans l'espace public, les formes de harcèlement sexuel et de harcèlement sexuel de rue commis dans des lieux publics sont punissables. La loi stipule que toute personne ayant un comportement ou un geste, en public ou en présence de témoins, visant à considérer une personne comme inférieure ou à la mépriser en raison de son sexe ou encore de la réduire à sa dimension sexuelle, peut être punie." == Drague ou harcèlement? == Dans les lieux publics comme la rue, les parcs ou encore les transports en commun, le harcèlement sexuel peut se manifester de différentes façons : par des regards, des sifflements, des commentaires déplacés, des insultes, etc. Le harcèlement de rue (ou le harcèlement dans l’espace public) est différent de la drague. "'La drague"' est une forme de séduction destinée à charmer l’autre. Une personne approche une autre dans le but de la séduire. Cela peut par la suite aboutir à un échange sympathique si le/la destinataire est réceptif-ive et intéressé-e. "'Le harcèlement de rue"' naît d’une situation où le/la destinataire montre et/ou exprime un refus clair face à des propos ou à de gestes déplacés mais où l’auteur insiste tout de même. Cela crée alors un climat de peur et de frustration. Une relation de pouvoir inégale s’installe entre les deux personnes.
Auteurs de harcèlement sexuel de rue
Il n’existe pas de portrait-type de l’auteur de harcèlement de rue. Selon différents témoins, les harceleurs sont d’âge, d’origine, de religion, de métier et de milieu socio-économique différents. Dans la majorité des cas, il s’agit pourtant d’hommes.
Victimes de harcèlement sexuel de rue
Quant aux victimes, ce sont majoritairement des femmes faisant face à ce genre de remarques ou de comportement. Elles sont de tout âge, de différentes origines ethniques, de corpulences différentes, etc. Ces comportements, comme toutes les formes de violences sexuelles, sont le reflet des rapports de pouvoir inégaux instaurés dans notre société où la domination masculine est encore fort présente et où le sexisme ordinaire persiste. Ce concept représente la banalisation des faits de harcèlement sexiste, qu’ils aient lieu dans l’espace public ou bien dans la sphère privée ou professionnelle.
Conséquence du harcèlement sexuel de rue :
Le harcèlement dans l’espace public et le sexisme ordinaire sont des formes de violences qui ont, entre autre, des conséquences psychologiques et sociales chez les victimes. Au niveau psychologique, les attaques sexistes et violentes subies par la victime peuvent ébranler son estime personnelle. Celle-ci va alors se dévaloriser elle-même et parfois même s’approprier les propos tenus par le harceleur. Ces faits de harcèlement peuvent également faire apparaître un sentiment d’insécurité et de peur chez la victime qui évitera alors au maximum de sortir de chez elle, la poussant à s’isoler. Au niveau social, pour « composer avec le harcèlement de rue », les victimes mettent en place au quotidien de nombreux comportements d’évitement. Par exemple, ne plus porter certains types de vêtements, ou bien emprunter des trajets différents afin d’éviter les rues où elles se sont déjà faites harcelées, ou encore sortir uniquement accompagnées. Ces stratégies prouvent que les victimes ne se sentent désormais plus en sécurité dans l’espace public. À ces différentes conséquences vient s’ajouter la culpabilisation de la victime par l’entourage et/ou la société. Il n’est pas rare d’entendre : « Que faisais-tu à cette heure-là à cet endroit ? » , « Elle portait une jupe ! », « Elle lui a souri ! » ou encore « Moi à ta place, j’aurais pris un taxi au lieu du métro »